Regards clos en deltas amnésiques surplombent des bouches verrouillées en cascades gelées. Que racontent encore nos vagues empreintes après un si long voyage ? Des villes immobiles en arrière-pensée comme la persistance d’un songe, parties de nous-mêmes qui retracent une histoire enfouie depuis si longtemps… Nous étions ces cités, nous étions ces roches, nous étions ces tours et ces concrétions descendantes, c’était nos vies, nos projets et nos rêves… Nous déambulons maintenant dans les rues d’un imaginaire à réinventer, nous redessinons nos possibles sur l’étrange architecture de cette union si étroite, unique, dont l’ADN s’empare de deux individualités pour ne former qu’une seule entité…

Nous évoquons un singulier patchwork, nous sommes des tissus d’idées, de sensations et de souvenirs ; là un profil, ici encore des fissures, plus haut les toiles d’un brouillard fantomatique coiffent nos têtes qui s’étendent en d’urbaines divagations…

Un visage impassible, sans ornement émotionnel, et l’autre, si proche, à deux doigts de rentrer en contact avec cette paix glacée, l’autre disais-je comme figé dans un pincement, à jamais immobilisé dans l’ébauche d’une douloureuse grimace…

Corps miroirs en fragments d’éclats, nous patientons nos reflets dans l’attente d’une complète fusion, dans l’espoir d’une renaissance qui aura reconquis l’unité perdue à travers le regard de cet «autre» encore inconnu.